7.26.2020

Catholique a ecrit :


Bonjour Wahrani,
En effet, Abraham n’était pas juif et ne savait rien de livres écrits bien après lui qui fondent la norme religieuse juive aujourd’hui encore, comme le Lévitique ou les Nombres. Pour nous catholiques, Abraham est une figure universelle, porteur d’une filiation spirituelle, même si le lien n’est pas défendu avec autant de vigueur que les Juifs qui se présentent comme ses descendants. Le dernier prophète de l’Ancienne Alliance, Saint Jean-Baptiste balaye toutes les prétentions fondées sur la filiation naturelle :

« Voyant beaucoup de pharisiens et de sadducéens se présenter à son baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit digne de la conversion. N’allez pas dire en vous-mêmes : “Nous avons Abraham pour père” ; car, je vous le dis : des pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. »

Matthieu 3, 7-9

Abraham était en effet d’origine sumérienne et son nom initial « Abram » qui signifie « père noble » ou « père élevé » suggère une haute naissance. Je n’irais pas au-delà de conjectures sur le milieu familial et social de la famille d’Abram. Vous connaissez l’histoire, issue du Talmud (dans le Midrash Rabba 38, 13) et reprise dans le Coran (21,51-70) où Abram brise les idoles vénérées par son père, qui en fait commerce,  et son peuple. Il me semble que le vrai conte des milles et une nuits est celui qui tord la réalité pour satisfaire de petites fiertés nationales (celle des juifs) ou religieuses (celle des musulmans) en faisant d’Abram l’auteur d’un coup d’éclat, seul monothéiste contre tous, pour détruire les idoles et finir brûlé. Je préfère la Genèse qui nous offre un portrait contrasté du patriarche et de ses descendants immédiats.

La Genèse ne cache rien des vicissitudes et des stratagèmes parfois discutables auxquels les patriarches ont dû avoir recours pour seulement survivre. Nous en avons déjà parlé, Abraham finasse pour faire passer son épouse pour sa sœur (ce qu’elle était également, puisqu’ils avaient le même père) ; Jacob est malin comme un singe et assez peu scrupuleux surtout quand ça l’arrange. Ces ancêtres pourraient avoir leur photo anthropométrique dans les commissariats ! Il aurait été plus compréhensible de montrer les patriarches comme des parangons de vertu ou de force face à des ennemis, plutôt que de mettre en exergue tout ce qui chez eux sont faible.

Il me semble que la question à se poser est pourquoi Abram ? Qu’est-ce qui chez lui a attiré l’attention de Dieu, dans sa quête d’un homme à qui confier Sa Parole et son projet pour l’Humanité, celui de l’annonce d’un Sauveur ?

La pensée juive met en avant les 10 épreuves d’Abraham qui ont forgé en lui les qualités spirituelles lui permettant de transmettre la promesse de l’Alliance. Je partage cette vision des choses : en quelque sorte, Abram était un homme unique dans son époque. Il est le seul à pratiquer la charité et la justice par respect de la sainteté de Dieu au milieu de peuples idolâtres, sans foi ni loi au sens propre du terme. Il est même le premier homme à prier en faveur d’autres hommes, dans l’affaire de la destruction de Sodome. Là où règne le chacun pour soi, il est capable de donner généreusement et gratuitement. C’est ce qui répond à votre question concernant Gn 26, 5 : pour la lecture juive de cette situation, Abraham appliquait spontanément la Torah, bien avant qu’elle ne soit donnée au Mont Sinaï. C’est une vision un peu promotionnelle de la chose, je vous l’accorde et le judaïsme cherche souvent à dédouaner certains de ses personnages illustres de certaines faiblesses, assez humains somme toute.

Pour ma part, ce passage me semble plutôt nous dire que la joie d’Abraham est de vouloir ce que Dieu veut, que cela n’a pas toujours été simple pour lui de s’accorder à la volonté de Dieu mais que chacune des situations surmontées a façonné en lui un cœur toujours plus ouvert à la présence de Dieu et à l’attente de son Christ. Ce que Jésus rappellera :

«Abraham votre père a exulté, sachant qu’il verrait mon Jour. Il l’a vu, et il s’est réjoui. »
Jean 8, 56

La profondeur du portrait psychologique de chacun des patriarches et la rigueur du propos de l’ensemble du livre de la Genèse où tout est rapporté à la fondation de la lignée messianique (à la fin du livre, c’est Judas qui est désigné pour être l’ancêtre du Christ à venir) suffit à prouver qu’il y a 2 auteurs à ce livre : Dieu lui-même qui y dévoile progressivement son Christ et l’auteur humain, Moïse selon la tradition juive et chrétienne conjointes, un auteur qui connaissait aussi bien le projet de Dieu que l’histoire des patriarches, rapportée de génération en génération parmi les fils d’Israël.

Avec l'aide de Dieu, nous approfondirons ces questions…

Catholique


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Wahrani a écrit :

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